Lorsqu’un proche atteint de troubles de la mémoire exprime un désir intense de retourner dans la maison de son enfance ou de revoir ses parents, il est fréquent que ce comportement suscite confusion et détresse chez ses aidants.
Pourquoi veut on "rentrer chez soi" ?
Pourquoi veut-on "rentrer chez soi" ?
Recherche de sécurité et de réconfort
La maison d’enfance est souvent associée à un lieu de sécurité, où les expériences de vie ont été empreintes de confort et de stabilité. Selon les travaux de Bowlby (1969) sur la théorie de l’attachement, les figures parentales et les lieux sécurisants restent des ancrages émotionnels puissants tout au long de la vie. Dans les moments de stress ou d’anxiété, les personnes atteintes de troubles cognitifs cherchent à retrouver ces repères.
Cette recherche de sécurité est davantage liée à un besoin émotionnel qu’à un lieu physique. Cela explique pourquoi répondre de manière empathique aux besoins émotionnels du malade peut parfois suffire à apaiser cette demande.
Confusion temporelle et régression mnésique
Les troubles de la mémoire entraînent une amnésie antérograde (perte des souvenirs récents) et une préservation relative des souvenirs anciens. Ainsi, les personnes peuvent se croire à une époque passée, où leurs parents étaient encore en vie et où leur maison d’enfance représentait leur quotidien.
Il est important de comprendre que pour ces personnes, cette perception erronée du temps est réelle. Cela nécessite une approche douce et respectueuse de leur réalité intérieure.
Désorientation spatio-temporelle
La désorientation peut provoquer un sentiment de déracinement et d'insécurité. Les personnes ne reconnaissent plus leur environnement actuel comme familier et cherchent à revenir vers un lieu "connu", souvent idéalisé, qui représente un retour aux repères.
Besoin de connexion émotionnelle
La volonté de retrouver ses parents ou un lieu familier peut être perçue comme une recherche de connexion affective. Selon Maslow (1943), le besoin d’appartenance et de lien est fondamental pour le bien-être émotionnel. Chez les patients atteints de troubles cognitifs, ce besoin peut être exacerbé par un sentiment de solitude ou d’abandon.
Comment accompagner un proche dans ces moments ?
Faire preuve d’empathie et valider leurs émotions
Ce qu’il faut éviter :
« Mais non, tes parents sont morts depuis longtemps ! »
« Ta maison d’enfance n’existe plus, ça ne sert à rien d’y penser. »
Ces réponses risquent d’aggraver la confusion ou d’induire des émotions négatives comme la colère ou la tristesse.
Les réponses à privilégier :
Si la personne exprime le désir de voir ses parents :
« Tes parents te manquent, n’est-ce pas ? Ils t’ont beaucoup aimé. »
« Je comprends que tu aimerais les revoir. Parle-moi d’eux, qu’est-ce que tu aimais faire avec eux ? »
Si elle veut "rentrer à la maison" :
« Oui, je sais que c’est important pour toi d’être chez toi. Dis-moi à quoi ressemblait ta maison. Elle devait être magnifique. »
Ces réponses valident les émotions et évitent une confrontation directe avec la réalité. Elles permettent à la personne de se sentir écoutée et comprise.
Créer un environnement de sécurité et de réconfort
Aménager l’espace pour qu’il soit familier et rassurant :
Disposez des photos de famille visibles, notamment des parents ou de la maison d’enfance.
Ajoutez des objets significatifs (ex. : une couverture ancienne, des souvenirs).
Diffusez des parfums ou des sons associés à des souvenirs heureux (ex. : odeur de lavande, musique des années de jeunesse).
Utiliser la musique :
Si votre proche aimait une chanson particulière que ses parents chantaient, jouez-la. La musique agit comme un puissant déclencheur émotionnel positif.
Créer une routine quotidienne :
La stabilité d’une routine peut apaiser les désirs de changement ou de départ.
Petit-déjeuner à heure fixe avec une activité douce comme feuilleter un album photo.
Moment calme avec une tisane et une chanson du passé en fin de journée.
Utiliser la distraction bienveillante
Si votre proche insiste pour "aller chez ses parents", vous pouvez détourner son attention avec des activités engageantes ou rassurantes :
Proposer une promenade :
« On pourrait faire une petite marche dans le jardin pour se préparer. Qu’en penses-tu ? »
Feuilleter un album photo ou dessiner :
Sortez des photos anciennes et discutez-en : « Regarde cette photo, c’est toi avec tes parents. Tu te souviens de ce moment ? »
Proposez un dessin : « Dessinons la maison où tu habitais. Raconte-moi à quoi elle ressemblait. »
Préparer un moment agréable :
« Et si on préparait un bon goûter ensemble avant de partir ? »
Impliquez la personne dans une tâche (éplucher des fruits, préparer le thé), ce qui détourne son attention.
Gérer les comportements associés à l’errance
Si votre proche tente de partir physiquement à la recherche de ses parents ou de sa maison, voici des mesures concrètes :
Accompagner son besoin de mouvement :
Au lieu de le retenir, proposez une promenade encadrée dans un lieu sûr, comme le jardin ou un parc.
S’assurer qu’ils portent un moyen d’identification :
Bracelet, porte clé avec nom et numéro de téléphone.
En Conclusion
Lorsque votre proche veut "rentrer chez lui", rappelez-vous qu’il ne s’agit pas simplement d’un lieu physique, mais d’un besoin de réconfort et de sécurité.
En répondant avec empathie, en créant un environnement rassurant et en détournant l’attention avec douceur, vous pouvez transformer ces moments d’inquiétude en instants de connexion.
Avec le temps, vous trouverez les gestes et les mots qui apaisent votre proche tout en prenant soin de vous-même.
Comment les Carnets de Léon et Augustine peuvent vous aider ?
Les observations partagées dans cet article montrent que le rôle des aidants est complexe et émotionnellement exigeant. Il ne s’agit pas seulement de répondre aux besoins pratiques mais aussi d’apaiser les angoisses, de recréer un environnement sécurisant et de maintenir des moments de complicité avec le proche atteint de troubles cognitifs.
Les Carnets de Léon et Augustine sont précisément conçus pour répondre à ces enjeux. Ils offrent une multitude d’activités adaptées qui permettent de stimuler les souvenirs et les capacités cognitives tout en créant des instants d’échange.
Merci pour ces articles qui confortent les conseils que nous donnons aux aidants et les attitudes que nous essayons d'adopter avec les malades.